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Les attentats de Karachi, pouvoirs politiques et médiatiques

Un attentat meurtrier attribué de manière catégorique à Al Qaeda, une obstruction manifeste du pouvoir politique lors de l’enquête, une affaire de corruption mêlée au complexe militaro-industriel.Voici les protagonistes d’une affaire ayant bien des points communs avec le 11 septembre 2001.

Alors que les deux journalistes de médiapart, Fabrice Arfi et Fabrice Lhomme, viennent de publier leur ouvrage sur les attentats de Karachi, on peut constater sans trop d’effort et très logiquement, qu’à chaque fois qu’une affaire touche « la raison d’État », les enquêtes et autres investigations sont rendues extrêmement difficiles.

À tous ceux qui crient au délire lorsque l’on explique que le gouvernement Bush a empêché toute enquête indépendante sur les attentats du 11 septembre, il est désormais facile de les renvoyer à cette affaire d’actualité franco-pakistanaise. Une des conclusions de l’enquête des journalistes de médiapart est que la thèse attribuant les attentats de Karachi à Al Qaeda n’est qu’ « une pure construction policière ». Plus grave encore, ils prouvent que le juge Jean-Louis Bruguière a délibérément mis de côté la piste de la corruption dans un contrat d’armement, alors que son rapport d’instruction comportait de nombreux éléments clés désignant manifestement la piste des commissions occultes mettant directement en cause Édouard Balladur et Nicolas Sarkozy. Ici encore, on retrouve des méthodes classiques d’obstruction à la justice des éléments d’enquête dissimulés ou gardés hors de connaissance des parlementaires.

Dès lors, on a du mal à comprendre pourquoi la plupart des journalistes français font coalition et s’opposent à toute réflexion critique de la thèse officielle des attentats du 11 septembre 2001 donnée par le gouvernement Bush. Nous avons pourtant sous les yeux, une affaire de moindre envergure, mettant directement en cause des dirigeants de notre pays ; et l’on constate une réponse similaire du pouvoir politique, qui vise à étouffer l’affaire pour se protéger de fâcheuses retombées. Autre similitude, le bouc-émissaire tout trouvé est Al Qaeda. Et malgré le fait que l’ex-directeur du contre-terrorisme de la DGSE ait déclaré qu’Al Qaeda était morte en 2002, le juge Bruguière, lancé dans l’aventure politique au sein du groupe UMP, n’a cessé de désigner ce coupable facile en évitant méticuleusement tous les éléments pointant la responsabilité vers des responsables politiques. N’y voyez pas un raccourci hâtif, les nombreux parallèles entre ces deux affaires sont réunis ici pour prouver aux sceptiques qu’il est primordial de pouvoir enquêter sur ce qui s’est passé le jour du 11 septembre 2001. Tout comme les familles des victimes de l’attentat de Karachi, de nombreuses familles des victimes américaines réclament encore, neuf ans après, une enquête indépendante pour comprendre les raisons du décès de près de 3000 personnes.

L’affaire de Karachi donne bien la mesure de l’indépendance du pouvoir judiciaire de notre pays. Comme dans tous les aspects de notre société, il s’agit d’un rapport de forces, familles des victimes contre dirigeants politiques, journalistes et parlementaires contre responsables de corruption, citoyens face aux raisons d’État et à l’industrie de l’armement. L’avancée de l’enquête sur l’attentat de Karachi est le reflet de l’état de santé de notre société. Tout comme le traitement des attentats du 11 septembre 2001 met en lumière les valeurs et éthiques souvent bafouées.

Comme pour le 11 septembre, le coupable désigné est Al Qaeda. Comme pour le 11 septembre, l’enquête est entravée par le pouvoir politique. Comme pour le 11 septembre, les pseudo-experts omettent sciemment les pistes dérangeantes. Comme pour le 11 septembre, les médias relatent l’avancement de cette enquête difficile. (Aux USA, de nombreux membres de la commission d’enquête ont dénoncé l’obstruction faite par le gouvernement Bush.)Et comme pour le 11 septembre 2001, on peut prédire que l’enquête va lentement s’enliser, que les responsables ne seront pas inquiétés. De cette affaire restera une idée trouble et diffuse, sans véritable coupable déterminé. Le spectre d’Al Qaeda, coupable potentiel et non disculpé, persistant encore dans l’imaginaire comme un épouvantail efficace. Mais à trop utiliser cette marque déposée de la terreur, la population risque ne plus être crédule… A moins que le courageux magistrat anti-terroriste Marc Trévidic, les familles des victimes, les citoyens, et les véritables journalistes ne se montrent plus exigeants envers leurs dirigeants !

Atmoh, pour le blog ReOpen911 sur Mediapart