Egalité et Réconciliation
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Northwoods, "11 septembre" et autres folies… (A White House of Fools)

De notre envoyé spécial à Caracas

Le 12 septembre 2001, les conversations tournaient autour de… Pearl Harbour !... tant les événements de la veille incitaient au rapprochement.

En décembre 1941, Roosevelt faisait face à une opinion états-unienne résolument non-interventionniste. Or, Roosevelt voulait "sa"guerre. Les armées de l’Axe étaient aux portes de Moscou et, à la Maison Blanche, on ne pouvait tolérer la chute du régime stalinien qui aurait remis en question toute la géostratégie US (telle qu’elle sera connue du public après Yalta).

Sa pauvreté en ressources minières était la grande faiblesse du Japon et ses dirigeants savaient que, si guerre il devait y avoir, il fallait frapper sans plus attendre. Roosevelt le savait aussi et, ainsi donc, dans cette guerre des riches contre les pauvres, les premiers allaient forcer les seconds à frapper. Même les moins sérieux parmi les centaines d’ouvrages écrits sur cet événement crucial admettent la présence d’un incontestable et gigantesque " ?" au sujet de certains faits troublants qui laissent penser que l’attaque japonaise avait été voulue, provoquée et prévue par Roosevelt et son entourage belliciste. Mais allons ! Un président des USA aurait-il ainsi délibérément abandonné des bâtiments de guerre – il est vrai déclassés, les unités modernes et performantes étant, par une heureuse fortune, au large de la base navale – et des milliers de marins et civils aux bombes japonaises ?

C’est précisément cette question qui emplissait l’éther en ces lendemains d’attentats de New-York : croyez-vous vraiment que George Bush aurait osé, en bon chrétien qu’il est, planifier l’attaque contre les Twin Towers, livrer à une mort horrible leurs milliers de visiteurs ?

Bientôt, il est vrai, des premières rumeurs circulaient selon lesquelles certaines sociétés commerciales domiciliées dans ces bâtiments auraient, ce jour-là, congédié leur personnel, évacué des valeurs… Au cours des années écoulées, une abondante littérature a fleuri, cependant qu’aux USA mêmes l’opinion est agitée par un débat sur ces événements et sur les deux opérations militaires qu’ils ont engendrées et cautionnées : les invasions de l’Afghanistan et de l’Irak. Bush voulait-il, comme Roosevelt en 1941, "sa" ou plutôt "ses" guerres, devait-il pour les justifier avoir recours à la même ruse ? Les victimes du WTC pèsent-elles plus lourd sur sa conscience que celles de Pearl Harbor sur celle de Roosevelt ?

Il se trouve qu’à peine trois ans avant le fameux 11 septembre, on commémorait à Madrid le douloureux centenaire de 1898 ; douloureux, en effet, pour le peuple espagnol, pour sa marine notamment. L’Espagne était alors confrontée dans ses colonies de Cuba, de Puerto-Rico et des Philippines à une rébellion ouvertement soutenue de Washington dans son désir de s’emparer des possessions de la grande – certes déclinante - puissance navale européenne. Or, en pleine crise, le cuirassé états-unien USS Maine vient faire escale à La Havane. Pas seul d’ailleurs, puisque à proximité se tient le yacht du magnat de la presse américaine, W.R. Hearst. Dans ses salles de rédaction, on a déjà annoncé la guerre avec l’Espagne. Malgré la tension entre les deux pays, les officiers du USS Maine sont pourtant reçus avec courtoisie et laissés libres de s’adonner aux plaisirs de La Havane. L’équipage, à grande majorité composé de Noirs, est par contre consigné à bord. Nous sommes le 15 février 1898. Vers 21:40, une gigantesque explosion envoie le navire par le fond avec 266 hommes. Immédiatement, Washington accuse Madrid, Madrid dément et propose de collaborer à l’enquête sur le drame ; ce que Washington refuse. Le 28 mars, la US Naval Court of Inquiry de Key West déclare qu’une mine navale a causé l’explosion. À la Maison Blanche comme dans les salles de rédaction de W.R. Hearst, on peut enfin annoncer la déclaration de guerre à l’Espagne.

On connaît la suite : dans cette autre guerre imposée par le riche au pauvre, les navires de guerre espagnols sont techniquement nettement inférieurs à ceux de la US Navy qui inflige à l’Espagne un nouveau Trafalgar. Sur terre, les garnisons espagnoles se défendent bravement contre l’assaut des rebelles puissamment armés et soutenus par Washington ; Theodore Roosevelt, dont le cousin déclarera le guerre au Japon en 1941, étant déjà sur place avec ses Rough Riders.

En ce temps-là, la circulation des informations était plus lente qu’aujourd’hui et s’il fallut à peine quelques mois, après l’agression de l’Irak en 2003, pour confirmer la totale absence des arsenaux de destruction massive ayant, avec l’attaque des Twin Towers, servi de prétexte à l’opération, il fallut 88 ans pour découvrir, suite à l’enquête menée en 1976 par l’amiral Hyman Rickover, que la cause du drame était interne au navire, vraisemblablement, dit-il, liée à un incendie dans les soutes à charbon. Ainsi donc, une guerre pour rien, sans aucun motif, puisque l’innocence de l’Espagne a été établie. Le gouvernement états-unien a-t-il proposé à l’Espagne des compensations, formulé des excuses ?

Certes, il n’existe aucune preuve établie d’une interaction des deux bateaux américains ancrés à La Havane, comme par exemple d’un homme-grenouille quittant le yacht de Mr Hearst pour aller fixer une bombe sur la coque du Maine ; pas plus d’ailleurs que d’un ordre de Roosevelt de mettre en œuvre l’affaire de Pearl-Harbour. À qui profite le crime ? peut-on simplement s’interroger dans les deux cas. Il existe par contre une documentation archivée de l’Opération Northwoods de 1962.

C’était un an après le fiasco de la Baie des Cochons et Kennedy était accusé par les milieux de droite d’être un loser sinon carrément un traître (ce seront d’ailleurs là les motifs retenus de son assassinat dans un cover-up destiné à occulter le fait que Kennedy avait des projets portant atteinte au pouvoir des Banques). Pire, le président des USA avait formellement déclaré son opposition à toute action militaire contre Cuba alors que, avec ou sans son approbation, se poursuivait contre la république castriste une stratégie de déstabilisation terroriste connue sous le nom d’opération Mongoose (Mangouste), visant notamment ses installations commerciales et touristiques, et dirigée par le général Lansdale.

Aussi, face à cette interdiction d’une action extérieure contre Cuba, l’état-major suprême des forces armées (Joint Chiefs of Staff) en la personne du général Lemnitzer conçut-il le projet d’une action intérieure aux USA, précisément de créer de toutes pièces un terrorisme castriste qui frapperait des intérêts états-uniens, privés ou politiques, civils ou militaires, ainsi que la communauté des réfugiés anti-castristes cubains. C’est pourtant dans cette communauté que la majorité des exécutants de l’opération seraient sélectionnés afin de mieux donner le change, si bien que le plan de l’opération prévoyait avec le plus grand cynisme, non seulement la destruction de matériels appartenant aux forces armées états-uniennes ou à des organisations privées, mais encore le massacre de militaires et de civils états-uniens, d’émigrés cubains anti-castristes par d’autres cubains anti-castristes, revêtus de distinctifs du régime de La Havane. Il s’agissait donc, effectivement, de développer une activité terroriste dans les grands centres urbains des États-Unis consistant en attentats tuant aveuglément des innocents, de couler en haute mer des bateaux transportant des émigrés cubains anti-castristes, de détourner des avions, etc..

En fait, l’idée semble avoir germé sous la casquette d’Eisenhower, le vieux général ne voulant pas terminer son mandat présidentiel sans un coup d’éclat. Le 3 janvier, à quelques jours de l’arrivée de John Kennedy à la Maison Blanche, il confia au général Lemnitzer qu’il tenterait bien une action d’envergure contre Cuba si les Cubains voulaient bien lui en donner l’occasion et que, si ces derniers ne le voulaient pas, il faudrait bien fabriquer cette occasion à leur place. Ainsi donc, l’opération prévoyait-elle la tuerie délibérée de civils et militaires américains, d’émigrés anti-castristes, par des membres des forces armées US appuyés par des supplétifs cubains anti-castristes. Justement, le 20 février 1962, John Glenn, le premier Américain à être mis sur orbite, devait entreprendre son aventure spatiale de Cape Canaveral, dans une navette portant les symboles de la démocratie états-unienne. Lemnitzer et ses complices, misant sur l’immense popularité dont jouissait le fameux cosmonaute, prévirent un sabotage de la fusée qui entraînerait sa mort, attentat qui serait attribué à des agents de Fidel Castro et dont la conséquence immédiate serait la déclaration de guerre contre Cuba.

Simultanément, la base de la US Navy à Guantanamo (décidément, certains lieux ont les faveurs de l’Histoire) devait être attaquée de l’extérieur par des agents cubains de la CIA revêtus d’uniformes de l’armée cubaine, d’autres devaient se livrer à l’intérieur à des actes de sabotage incluant l’explosion d’un navire de guerre (sans doute Lemnitzer avait-il en mémoire le précédent du USS Maine). Il était encore question de la destruction par des avions de chasse portant les couleurs cubaines d’un avion de ligne civil, porteurs d’étudiants et de touristes se rendant au Venezuela ou en Colombie. Enfin, des bombes devaient exploser dans les lieux publics des grandes villes des USA, tuant au hasard des centaines de civils, ainsi que toute action terroriste est supposée le faire.

Tous les détails de l’opération firent l’objet d’un long courrier au secrétaire d’État McNamara, recommandant qu’elle soit placée entre les mains de l’état-major suprême des forces armées (Joint Chiefs of Staff). Le mardi 13 mars à 14:30, le général Lemnitzer eut un dernier briefing sur les détails de l’Opération Northwoods avec le chef de ses opérations spéciales, le général William H. Craig, et signa le document. Dans la foulée, il fut reçu par McNamara puis par le conseiller militaire de la Présidence, le général Maxwell Taylor. Quels que fussent les propos tenus dans ces différents meetings, il advint que trois jours plus tard, le Président Kennedy avisa Lemnitzer que toute action militaire contre Cuba était hors de question.

Lemnitzer et ses aides-de-camp ne se le tinrent pas pour dit et même après que leur chef eût été envoyé se calmer en Europe au commandement suprême de l’OTAN, ces derniers continuèrent jusqu’à la fin de 1963 à ébaucher des provocations anti-cubaines qui justifieraient une opération conventionnelle de grande envergure et le renversement du régime castriste. Entre-temps, en mai 1963, le Secrétaire Adjoint à la Défense Paul H. Nitze envoyait un rapport à la Maison Blanche proposant "un scenario possible, impliquant l’attaque d’un avion de reconnaissance US, susceptible de justifier effectivement le renversement du régime de Castro." Au cas où Cuba abattrait un avion-espion U-2, le plan proposé consistait à envoyer d’autres pilotes de la USAF, avec ordre de voler à une altitude tellement basse qu’ils seraient des proies offertes à la DCA cubaine, leur ‘sacrifice’ étant le prix à payer pour l’entrée en guerre avec Cuba. Pas plus que les sanglantes et criminelles divagations de Lemnitzer, le plan de Nitze ne fut retenu par Kennedy.

Il semble que, malheureusement, John Kennedy ait été une exception dans la succession des hôtes de la Maison Blanche, précédé et suivi par une chaîne de fous furieux bellicistes entourés d’une caste militaire envisageant froidement, pour parvenir à ses fins, de faire tuer ses propres soldats, marins et aviateurs, plus largement encore, de mettre sur pied une organisation terroriste dont la création serait attribuée au régime que l’on veut abattre, causant des milliers de victimes civiles états-uniennes. C’est sans doute ce qui lui valut d’être abattu un an plus tard dans un complot regroupant bellicistes frustrés, mafiosi privés de l’axe Las Vegas-La Havane, usurocrates menacés dans leurs gains. On ne sait ce qu’il serait advenu si les Lemnitzer, Nitze, Lansdale et leurs sous-fifres avaient proposé leurs plans criminels à un Theodore ou à un Franklin Roosevelt, à un Eisenhower, à un Ford, à un Nixon ou encore à un George Bush.

Mais peut-être, en ce qui concerne ce dernier, le 11 Septembre 2001 et les hauts faits de son ami de famille, complice en déstabilisation tous azimuts et partenaire en affaires de pétrole, Osama Bin Laden, apportent-ils une réponse… éclatante.