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Misrata et l’anarchie libyenne

En Libye la guerre est désormais totale. Jusqu’à présent tous se battaient contre tous dans un climat d’anarchie duquel aucune solution ne pouvait émerger.

 

Désormais, trois grands camps s’affrontent qui devraient peu à peu engerber les multiples forces secondaires qui mettent le pays en coupe réglée. Nous commençons donc à y voir plus clair car, c’est du rapport de force qui va s’établir entre ces trois grandes composantes que sortira la paix future et la reconstruction de la Libye.

- 1) En Cyrénaïque, depuis le début du mois de mai 2014, le général Khalifa Haftar, a lancé l’Opération dignité contre les milices islamistes. Aujourd’hui, il contrôle la région, à l’exception de la ville de Derna. Après les derniers attentats dirigés contre les coptes et qui furent téléguidés depuis Derna, le maréchal Sissi va appuyer encore davantage le général Haftar, avec une priorité : liquider cette poche islamiste. Le général Khalifa Haftar est issu de la tribu des Ferjany dont le fief est la ville de Syrte, ville natale du colonel Kadhafi. Il fut avec ce dernier, un des auteurs du coup d’État militaire qui renversa le roi Idriss en 1969. S’il s’est ensuite brouillé avec son camarade, il n’a en revanche jamais rompu les liens avec sa tribu, ce qui le place au cœur d’une alchimie tribale stratégique située à la jonction de la Cyrénaïque et de la Tripolitaine. Il est soutenu par l’Égypte, les Émirats arabes unis et la Russie. Actuellement, il livre bataille dans le Fezzan afin d’isoler les forces de Misrata (voir l’article consacré à la bataille de Brak page 3 de ce numéro).

- 2) À Tripoli, le GLUN (Gouvernement libyen d’union nationale) est désormais disposé à s’entendre avec le général Haftar. C’est pourquoi il est actuellement combattu par Misrata (Frères musulmans) qui serait la grande perdante d’un accord GLUN-Haftar. Alliées à de multiples composantes islamistes, les milices de Misrata occupent une partie de Tripoli, ce qui provoque l’exaspération de la population. Pour mémoire, le 15 novembre 2013, les miliciens de Misrata y avaient ouvert le feu sur une foule réclamant déjà leur départ, faisant plusieurs dizaines de morts et des centaines de blessés.

- 3) Misrata, ville riche, puissante, fief des Frères musulmans et tournée culturellement et politiquement vers la Turquie est une sorte de corps étranger sur le littoral libyen. De tout temps, elle a mené une politique autonome et, aujourd’hui, elle sent bien qu’elle risque d’être prise en étau entre le général Haftar et un pouvoir tripolitain reconstitué. Bien que soutenue par la Turquie et par le Qatar, sa position est fragile. Misrata a en effet contre elle, outre la population de Tripoli, les milices de Zenten, celles du djebel Nefusa, celles des Warfalla et les tribus de la région de Syrte qui n’ont pas oublié le traitement ignominieux que ses membres réservèrent au colonel Kadhafi après qu’ils l’eurent capturé.

Comme rien ne pourra être entrepris en Libye tant que la puissance de Misrata demeurera intacte, les actuels combats de Tripoli doivent donc être suivis avec attention. En effet, si les milices de Misrata étaient chassées de la ville, une telle défaite marquerait un tournant dans le conflit libyen car deux options seraient alors ouvertes :

- 1) Misrata accepte de négocier. La sortie de guerre prendrait alors la forme d’un fédéralisme à trois têtes : Tripolitaine, Misrata et Cyrénaïque. Le Fezzan des Toubou regarderait vers Benghazi et celui des Touareg vers Tripoli.

- 2) Misrata refuse de négocier. Toutes les forces de Libye risquent alors de se coaliser contre elle et des comptes séculaires se régleront alors.

Bernard Lugan

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6 Commentaires

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  • #1737232
    Le 31 mai 2017 à 15:16 par Georges 4bitbol
    Misrata et l’anarchie libyenne

    Que les massacreurs du colonel Khadafi soient retrouvés et jugés, en espérant pour eux que la même barbarie leur soit épargnée.

     

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    • #1737295
      Le Mai 2017 à 16:33 par linsay
      Misrata et l’anarchie libyenne

      Pourquoi épargner ces barbares, au contraire leurs réserver le même traitement qu’ils ont infligés au colonel Khadafi !? Il faut appliquer la loi du talion ;

       
  • #1737282
    Le 31 mai 2017 à 16:21 par Kdosche
    Misrata et l’anarchie libyenne

    Mais que font Mrs LEVY, SARKOZY.....et tous ces, assassins et grands pourvoyeurs de démokraties ????

     

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  • #1737466
    Le 31 mai 2017 à 21:10 par Jean Le Chevalier
    Misrata et l’anarchie libyenne

    Que Misrata soit rasée et ses islamistes avec...La libye a trop souffert, et ne peut pas se contenter de demi-mesure. Elle doit être impitoyable avec les assassins et se reconstruire au plus vite afin de tenir son rôle de verrou de la méditerranée.

     

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  • #1737699
    Le 1er juin 2017 à 06:18 par Nox44230
    Misrata et l’anarchie libyenne

    Khadafi n’était pas un enfant de coeur mais au moins le pays respectait les diversités ethniques (massacres de noirs libyens après sa mort), religieuses (déferlement de la haine wahhabite après sa mort), sociales (un état qui offrait un certain niveau de vie à sa population jusqu’à sa destruction), économiques (projet de Dinar-Or et de Banque Centrale africaine, projet de satellite de communication pour s’affranchir de la tutelle d’Eurosat) et politiques (soutien contre les apartheid en Afrique du Sud mais également en Palestine). Dans le fond sa plus grosse erreur a été de filer de l’argent à Sarkozy pour sa campagne électorale (50 millions ?). Que Haftar soit allié avec Sissi ça reste deux bidasses qui ne font pas nécessairement progresser la cause africaine.

    Chemise blanche à col ouvert devrait être jugé pour complicité d’actes de terrorisme et intelligence avec l’ennemi...

     

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  • #1743640
    Le 11 juin 2017 à 15:47 par Darren
    Misrata et l’anarchie libyenne

    " La sortie de guerre prendrait alors la forme d’un fédéralisme à trois têtes : Tripolitaine, Misrata et Cyrénaïque. Le Fezzan des Toubou regarderait vers Benghazi et celui des Touareg vers Tripoli."
    C’est ce qui semble être la solution la plus juste.
    La Tripolitaine et la Cyrénaïque reviendraient aux Berbères ce qui pourra au moins empêcher sur le long terme toute ingérence arabo-wahhabite de la part des pays du golfe dans cette zone.
    La culture Berbère est un rempart naturel contre l’islamo-baathisme et le terrorisme islamique qui y est associé.

     

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