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L’Amérique peut-elle gagner en Afghanistan ?

Les témoignages des officiers présents en Afghanistan, recueillis off record, décrivent une situation catastrophique pour l’ensemble des coalisés. Les publi-reportages ridicules, sous forme de télé-réalité, diffusés régulièrement sur les chaînes de télévision, sont bien loins de traduire ce que pensent vraiment nos soldats. La réalité est que le pays est aux mains des Talibans. Les seuls endroits où la paix règne sont ceux où les Talibans sont tout puissants. L’atmosphère générale dans le contingent français est que la présence française n’a aucun sens.

Pour analyser la « gagnabilité » de cette guerre, les critères définis par Gérard Challiand dans son livre « Stratégie de la guérilla » (1) semblent particulièrement bien adaptés. Selon ces critères, pour triompher, la guérilla doit disposer :

* Du soutien de la population. * D’un contrôle permanent et effectif du terrain. * D’une zone de repli où les combattants peuvent se restaurer ou/et d’un soutien extérieur.

L’adhésion de la population

L’idée que les Afghans vont adhérer en masse à l’American way of life est une chimère aussi ridicule que de justifier la présence occidentale, par le prétexte de la burqua. Les Afghans sont imperméables à l’Occident, d’autant que les bombardements de populations civiles ont achevé de discréditer la coalition. A cette situation sur le terrain s’ajoute l’absence de projet politique du côté américain. Le Président Karzaï, pachtoune d’origine et ancien employé d’UNOCAL (2), a été mis en place par une armée américaine, qui venait de remporter la guerre grâce à l’infanterie tadjike de l’alliance du Nord (3). Les dernières élections ont achevé de retirer toute légitimité au pouvoir de Karzaï.

Le contrôle effectif du terrain

De l’histoire des guerres de guérilla, nous pouvons retirer au moins une règle : les opérations coup de poing, brutales et géographiquement ciblées, ne servent le plus souvent strictement à rien, sinon à s’attirer la haine des populations civiles. Lorsque ces ratissages se terminent, et que les armées se retirent, les guérilléros sortent de leurs refuges souterrains, forestiers ou montagneux, et ils exécutent ceux qui ont collaboré. Cela conforte les populations civiles dans l’idée que les armées d’occupation, non seulement apportent les troubles et la violence, mais en plus sont inefficaces. Contre cette vulnérabilité fondamentale des forces d’occupation, les Anglais ont inventé le hameau stratégique en Malaisie, et les Français, les commandos de chasse en Algérie. Les uns et les autres disposaient de soldats aguéris avec une très forte autonomie, parfaitement intégrés dans le milieu humain et naturel où ils combattaient, le contraire de l’armée américaine en Afghanistan.

La disposition d’une zone de repli ou/et d’un soutien extérieur

Les guérilléros doivent pouvoir récupérer en toute tranquillité et se réapprovisionner en armes, munitions, médicaments et nourriture. Pour cela, ils doivent disposer d’une zone de repli en dehors des combats, soit sur leur propre territoire, soit à l’étranger. Les Talibans, qui contrôlent la majorité du territoire afghan, disposent en plus des zones tribales pakistanaises, où armes et munitions ne manquent pas.

Les Etats-Unis pensent-ils sérieusement pouvoir gagner la guerre contre les Talibans, alors que les bombes explosent jusque devant le quartier général de l’OTAN à Kaboul ? Espèrent-ils encore capturer Ben Laden ? Sans doute pas, mais quel choix leur restent-ils ? Un départ de l’Afghanistan entraînerait une disparition de la présence américaine en Asie centrale, ce qui équivaut à l’apocalypse dans la géopolitique traditionnelle américaine. Cela revient à abandonner le coeur du monde à la Russie et à la Chine. C’est la seule explication rationnelle de l’entêtement mortel de l’administration Obama.

Xavier Moreau

 






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