Egalité et Réconciliation
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Heureux comme un eurocrate retraité

Mars 2010

Entretien avec Pierre-Édouard du Cray, directeur des études de Sauvegarde Retraites.

http://www.sauvegarde-retraites.org/

À quelques jours des élections européennes, vous venez de publier une étude édifiante sur le régime de retraite des hauts fonctionnaires européens. Pouvez-vous nous en résumer les avantages ?

Le régime spécial de retraite des hauts fonctionnaires européens est encore meilleur que celui de nos parlementaires. Les pensions crèvent littéralement les plafonds. Une retraite à taux plein (70 % du dernier salaire) atteint, selon les profils, entre 12 500 et 14 000 euros par mois. Ensuite, pour valider une carrière complète, et donc bénéficier de ce taux plein, les intéressés n’ont pas besoin de travailler 40 ans comme dans les régimes de droit commun, mais seulement 16 ans. Par exemple, le Président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, touche un salaire de base de 24 422 euros par mois (29 504 euros avec les primes). En cinq ans de mandat, il a donc déjà acquis des droits à la retraite qui s’élèvent à 5 220 euros. Mais les commissaires sont loin d’être les seuls à bénéficier de telles sinécures. Des fonctionnaires beaucoup moins importants sont logés à la même enseigne. Par exemple, Tiili Virpi, simple juge au tribunal européen de première instance, bénéficie, au bout de 14 ans et 10 mois de carrière, d’une retraite de 12 285 euros par mois !

Pour de telles prestations, quel est le montant des cotisations de ces fonctionnaires ?

Zéro euro, zéro centime ! C’est bien simple, les hauts fonctionnaires européens ne paient aucune cotisation retraite. Ils sont totalement exonérés. En fait, c’est comme s’ils étaient rémunérés à vie. Une fois leur mandat terminé, ils continuent à émarger.

Pouvez-vous comparer le rendement de ce régime de retraite exceptionnel avec celui des salariés du privé en France ?

Les rendements sont incomparables. En moins de deux ans, les hauts fonctionnaires ont déjà acquis 1 500 euros de retraite par mois, l’équivalent de ce que perçoivent, en moyenne, les salariés du secteur privé après une carrière complète, c’est-à-dire 40 ans. Prenez le cas de Giovanni Buttarelli, « contrôleur adjoint de la protection des données ». Il a pris son service au 1er janvier de cette année. À l’automne, au bout seulement dix mois de service, il aura déjà acquis 636 euros de retraite par mois, l’équivalent, cette fois, de la pension moyenne servie aux agriculteurs français. En fin de mandat, au bout de cinq ans, il aura droit à près de 4 000 euros de retraite, pension qu’il pourra cumuler avec celle qu’il percevra d’autres régimes.

De telles prestations supposent une remarquable gestion de la caisse. Pouvez-vous nous en dire plus sur le financement de ce régime de retraite des hauts fonctionnaires européens ?

Oui, à première vue, on se dit que cette caisse de retraite est miraculeuse. Vous mettez zéro euro dans le cochon, pas même une petite pièce, et, au bout du compte, il vous rend des dizaines de milliers d’euros. C’est inespéré ! Pourtant, à l’évidence, il n’y a pas de magie. La caisse de retraite, c’est vous, c’est moi, ce sont les millions de contribuables européens. Dans les faits, les pensions sont payées directement par le budget de l’Europe, sans qu’aucune provision n’ait même été réalisée auparavant.

Les hauts fonctionnaires européens toujours prompts à jouer les « gendarmes de Bruxelles » et à prêcher l’orthodoxie budgétaire mènent, pour eux-mêmes, une politique laxiste totalement coupée des réalités.

Même les magistrats de la Cour des comptes européenne censés contrôler la bonne gestion des deniers publics profitent, sans aucune retenue, de ce système.